lundi 11 novembre 2013

Mort programmée d'un chat

A mon retour de Montréal, je m'arrête chez moi, à Orange, pour déposer ma valise pendant quelques jours avant de continuer mon voyage vers Bujumbura. Il est tard. Je suis fatiguée, et je souffre du décalage horaire. Je m'approche de la porte-fenêtre pour regarder le jardin intérieur entouré de très hauts murs. Soudain, deux billes lumineuses me fixent. Je fais un bon en arrière. Mon cœur bat à tout rompre. Je pense aux mauvaises séries que j'ai vues. Je secoue la tête pour remettre mes idées en place et rouvre les yeux. Plus rien. C'est pire. Je n'ai pas eu une hallucination. Mon imagination galope. C'est un vieil immeuble du 17ème et quand nous nous sommes installés, le propriétaire précédent nous a expliqué qu'il avait tout "blanchi" y compris la cave romaine qui donne directement accès au salon. Des anciens Orangeois, au sens de l'humour particulier, nous avaient même dit que l'immeuble était construit sur un cimetière. Toutes ces histoires me reviennent. C'est l'horreur. 
trouvé sur http://www.dinosoria.com/chat_noir.htm
Le chat était apparenté au Diable au Moyen-Age. By HiggySTFC  
C'est à peine si je n'entends pas des chaînes autour de moi et des voix venues d'outre tombe m'appeler. Mes méninges dansent la carmagnole, non, c'est la danse des revenants. Je m'enferme dans ma chambre, essaie de chasser ces mauvaises idées et m'endors... avec la lumière. Le lendemain, plantée devant la porte fenêtre, je suis en proie à une profonde réflexion. Que faire ? Quand soudain un chat noir montre le bout de sa queue. J'ai peur des chats, sauvages, et surtout des noirs. En Afrique on dit qu'ils sont porteurs de mauvaises nouvelles ou l'incarnation de mauvais esprits. Ma parano me reprend. Du calme, me dis-je. Réfléchis. Mais, plus je réfléchis, et moins je comprends comment a-t-il pu arriver ici. Je prends mon courage à deux mains pour l'appeler et m'approcher de lui. Il me montre les dents et émet des grognements bizarres. Ni une ni deux, je fais demi tour et appelle un voisin qui arrive avec des croquettes. Sans plus de succès. J'ai appelé les pompiers qui m'ont gentiment ri au nez, la police municipale, a "d'autres chats" à fouetter, la femme de ménage a peur des chats, et impossible de joindre la spa les week-end et les jours fériés. Alors, que faire ? J'ai passé ces quelques jours barricadée chez moi avec des cadavres de pigeons qui gisent, le matin devant ma fenêtre. Le soir, j'aperçois l'ombre du chat, grossie par la lumière, qui rôde et je ferme les yeux. Demain matin, je pars et pour de longs mois. Dans un pays où des intellectuels ont signé un manifeste pour le droit des animaux, je me demande pourquoi il est impossible de trouver quelqu'un pour déloger un chat, qui, à mon départ, n'aura que le droit de mourir.

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